Par un
doux après-midi, un vieux sage marchait le long d’une rivière lorsqu’il aperçut
soudain quelque chose s’agiter à la surface de l’eau. En se penchant, il
distingua un scorpion, emporté par le courant, luttant désespérément pour ne
pas se noyer.
Poussé
par la compassion, le sage tendit la main pour le sauver. Mais à peine eut-il
effleuré la créature que celle-ci, prise de panique, le piqua de son dard
venimeux.
Une
douleur fulgurante lui traversa la main, le contraignant à lâcher le scorpion,
qui retomba aussitôt dans l’eau tumultueuse. Pourtant, loin de se détourner, le
vieil homme tenta à nouveau de le secourir.
Une
nouvelle piqûre, plus violente encore.
Depuis la
rive, un jeune homme observait la scène avec stupeur. Incapable de se contenir
plus longtemps, il s’écria :
— «
Maître ! Ne voyez-vous pas ? Chaque fois que vous le touchez, il vous pique !
Laissez-le donc périr, c’est son destin ! »
La main
tremblante sous l’effet du venin, le sage esquissa un sourire et répondit d’une
voix sereine :
— « La
nature du scorpion est de piquer. La mienne est de sauver. »
Le jeune
homme fronça les sourcils, déconcerté.
Avec un
effort visible, le vieillard ramassa alors une large feuille, la glissa
délicatement sous le scorpion et, cette fois, sans subir de nouvelle blessure,
le porta jusqu’à la terre ferme, l’arrachant à une mort certaine.
Puis, il
leva les yeux vers le jeune homme et lui dit avec une douceur infinie :
— « Ne
laisse jamais la nature du scorpion changer la tienne. Ne permets pas que le
venin des autres t’empêche d’accomplir le bien. »