J’ai presque toujours vécu rongé par l’attente. L’attente de quoi, je ne saurais le préciser, mais assurément, de cette vie dont j’ai soif. Une vie haute, intense, mille fois plus riche que celle qui m’était avaricieusement concédée. Ce terrible ennui qui a enténébré ma jeunesse, je sais maintenant qu’il n’était autre que cette attente de la vie, de la vraie vie, de cela qui aurait eu enfin pouvoir de m’assouvir. Ainsi étais-je dans l’impossibilité de céder à l’instant, d’accueillir ce qu’il me proposait. Morne enfer de l’ennui qui vous coupe du peu susceptible d’adoucir la brûlure de la soif. Quel bonheur j’éprouve de constater que cette attente a pris fin, que je peux m’abandonner à l’instant, que je ne suis plus à toujours désirer autre chose que ce qui m’est offert.
Charles Juliet